Résultats de la campagne pilote de mesures dans les écoles et crèches de Martinique
La surveillance de la qualité de l’air intérieur, une ambition nationale
Les travaux du Grenelle de l’Environnement et du Plan National Santé Environnement (PNSE2) ont confirmé l’inscription parmi les priorités gouvernementales, de la surveillance de la qualité de l’air à l’intérieur des établissements collectifs recevant des populations sensibles, notamment les écoles et crèches.
Les AASQA (Association Agréée pour la Surveillance de la Qualité de l’Air) ont été ainsi sollicitées dans le but de valider des techniques et modalités de gestion de cette surveillance.
Une vaste campagne de mesure nationale a donc été lancée dans 300 écoles et crèches réparties dans 24 régions en France et dans les DOM.
Les mesures effectuées dans les 300 établissements ont concerné deux polluants :
– le formaldéhyde considéré comme le traceur de la pollution intérieur, notamment émis par certains matériaux de construction, le mobilier, certaines colles, les produits d’entretien, etc. ;
– le benzène considéré comme le traceur de la pollution extérieure, émis par la circulation automobile et les industriels.
Les mesures du formaldéhyde et du benzène se sont faites au moyen de tubes passifs à diffusion radiale.
En complément, des mesures du confinement ont été réalisées à l’aide d’un appareil spécifique appelé Lum’AIR.
Les différentes mesures se sont accompagnées d’un pré-diagnostic du bâtiment piloté par le CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) : description du bâtiment et de son environnement proche, inventaire des systèmes de chauffage et/ou ventilation, informations sur les activités et produits utilisés...
Comment s’est déroulée la campagne de mesure en Martinique ?
Sur le territoire de la Martinique, 10 écoles et crèches ont été investiguées. Ces établissements ont été sélectionnés en fonction de leur taille, leur situation géographique, leur situation par rapport à des sources de pollution potentielles. Le nombre de classes investiguées dans chaque établissement dépend de la typologie du bâtiment (tableau 1).
Le choix de ces établissements et le suivi de l’étude a été réalisé par un comité de pilotage (COPIL) composé de Madininair, de la DEAL (Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement), de l’ARS (Agence Régionale de la Santé), de la CIRE (Cellule Inter-Régionale d’Epidémiologie), du Rectorat et des collectivités concernées.
Durant l’année scolaire 2010-2011, Madininair a donc effectué des mesures dans ces 10 établissements sur 2 périodes différentes : en période humide de septembre 2010 à janvier 2011, puis en période sèche de mars à juin 2011.
Le formaldéhyde et le benzène ont été mesurés par prélèvements hebdomadaires sur ces 2 périodes. La mesure du confinement est réalisée en continu sur 2 semaines lors de chaque période.
Dans l’un des 10 établissements, la mesure du formaldéhyde fait l’objet d’un suivi temporel, c’est-à-dire que ce composé est mesuré par prélèvements hebdomadaires durant 16 semaines consécutives.
Résultats des mesures en Martinique
Les mesures se sont déroulées sans difficulté particulière. Les concentrations en formaldéhyde et en benzène respectent les valeurs repère actuelles.
Formaldéhyde
Les moyennes par établissement se situent entre 2,6 et 10 µg/m3, avec un maximum par établissement entre 2,6 et 18,9 µg/m3. La valeur repère du Haut Conseil de Santé Public (HSCP) de 30 µg/m3 est donc respectée dans tous les établissements. Au niveau national, 89,4% des établissements respectent cette valeur.
A noter toutefois qu’un établissement (l’école primaire Victor Hillion Dillon C) enregistre une concentration moyenne en formaldéhyde égale à 10µg/m3, la valeur guide applicable en 2023.
A l’échelle des salles, deux dépassent cette valeur guide de 2023 de 10µg/m3 : une salle dans l’école primaire de Victor Hillion Dillon C et une dans la maternelle « Les Abeilles » de Sainte-Luce.
Benzène
Toutes les moyennes par établissement respectent la valeur repère du HSCP de 5 µg/m3.
Les moyennes par établissement se situent entre 1,3 et 2,2 µg/m3, avec un maximum par établissement variant entre 1,5 et 2,5 µg/m3.
Dans trois établissements, la valeur guide applicable en 2016 de 2µg/m3 est dépassée. Les sept autres (soit 70%) ont une moyenne inférieure à 2 µg/m3 (44,7% au niveau national).
A l’échelle des salles, Madininair a enregistré 8 dépassements de la valeur guide de 2016 de 2µg/m3, répartis sur 6 établissements. Dans trois de ces six établissements, les concentrations en benzène mesurées à l’extérieur sont inférieures aux concentrations mesurées dans les classes investiguées (Ecole Gondeau, Ecole Victor Hillion Dillon C, Maternelle Batelière). Dans les trois autres établissements, les concentrations en benzène mesurées à l’extérieur des établissements sont supérieures aux concentrations mesurées dans les classes (Maternelle Fond-Lahaye, crèche Fort-de-France et crèche Lamentin).
Les établissements dont les classes ont des concentrations comprises entre 2 et 5µg/m3 font l’objet de recommandations simples en vue d’améliorer la situation.
Confinement
Les résultats ont été obtenus sous forme d’un indice de confinement allant de 0 (aucun confinement) à 5 (extrêment confiné) en fonction des concentrations relevées.
L’indice de confinement obtenu dans toutes les salles investiguées des 10 établissements varie entre 0 et 1 (pas à peu de confinement).
Ces résultats soulignent la bonne aération des salles, même dans les cas de salles climatisées ( école Saint-Just Orville à Case-Pilote).
Perspectives
Cette étude nationale a permis de valider les techniques et les modalités de gestion de la surveillance de la qualité de l’air à l’intérieur des établissements recevant du public.
Cette étude a ainsi initié deux décrets :
– Décret n°2011-1727 du 02/12/2011 relatif aux valeurs-guides pour l’air intérieur pour le formaldéhyde et le benzène
– Décret n°2011-1728 du 02/12/2011 relatif à la surveillance de la qualité de l’air intérieur dans certains établissements recevant du public
Le décret n°2011-1727 définit les valeurs-guides pour l’air intérieur comme « un niveau de concentration de polluants dans l’air intérieur fixé, pour un espace clos donné, dans le but d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine, à atteindre, dans la mesure du possible, dans un délai donné ». Pour le formaldéhyde, les valeurs-guides pour l’air intérieur sont 30µg/m3 pour une exposition de longue durée à compter du 1 janvier 2015 puis 10µg/m3 pour une exposition de longue durée à compter du 1 janvier 2023. Pour le benzène, les valeurs-guides pour l’air intérieur sont 5µg/m3 pour une exposition de longue durée à compter du 1 janvier 2013 puis 2µg/m3 pour une exposition de longue durée à compter du 1 janvier 2016.
Le décret n°2011-1728 instaure de manière progressive l’obligation de surveiller périodiquement la qualité de l’air intérieur dans les ERP par un organisme accrédité. Cette surveillance doit être réalisée par les établissements d’accueil collectifs d’enfants de moins de six ans et les écoles maternelles avant le 1 janvier 2015, les écoles élémentaires avant le 1 janvier 2018, les accueils de loisirs et les établissements d’enseignement du second degré avant le 1 janvier 2020, et les autres établissements avant le 1 janvier 2023.